Capsule d’information 04 : Pour tout savoir sur les thérapies complémentaires. Ici, les bénéfices associés. Enregistrée le 18.05.2021. Ci-dessous, le script complet suivi des références.
SCRIPT
Cette capsule d’information a pour but de présenter les bénéfices observés en cas de recours aux thérapies complémentaires ou, appellation que je préfère utiliser «Pratiques non conventionnelles – PNC». Voir pour cela la capsule d’information 01 où je développe le vocabulaire et appellations associées aux thérapies complémentaires.
Je parle de bénéfices observés et non d’efficacité scientifique, deux choses différentes car se sont d’autres indicateurs qui sont analysés.
ÉTAT DES LIEUX DE LA LITTÉRATURE SCIENTIFIQUE
Toutefois, avant de présenter les bénéfices et quelques recommandation pour la pratique, je vous propose de faire une petit état des lieux de la littérature scientifique : quelle efficacité démontrée des PNC ?
Il serait faux de croire que les scientifiques «boudent» les PNC et ne veulent pas les étudier. Il a plusieurs centaines de milliers d’études qui existent, probablement 1 million.
Par conséquent, aujourd’hui, on est en mesure d’analyser les études qui ont été faites, c’est-à-dire de comparer entre elles toutes les études qui ont porté sur une même approche, pour une même affection et d’en tirer une conclusion générale, ce que l’on appelle des méta-analyses : il s’agit d’analyser les analyses.
Voici un résumé de la littérature scientifique, permettant d’avoir une conclusion en clin d’oeil :
Malheureusement, comme vous pouvez le constater, les résultats sont décevants. Les effets observés sont faibles, il n’y a rien d’extraordinaire.
Passons tout de même en revue les résultats principaux que l’on peut lire dans la littérature scientifique. (Cliquez sur les liens pour accéder à l’article, les références complètes figurent à la fin du script)
- Les approches psycho-corporelles (Yoga) semblent améliorer la qualité de vie en cas de douleurs (lombalgies) et maladies chroniques (oncologie).
Commentaire : Le vocabulaire utilisé est très important. Les auteurs des études sont très prudents concernant les résultats : telle approche «semble» améliorer. On ne peut rien affirmer avec certitude.
- L’acupuncture semble indiquée contre la douleur, les effets secondaires post-opératoires (nausées et vomissements) ainsi qu’en prévention des migraines.
Commentaire : à nouveau «semble indiquée» car on n’est pas en mesure aujourd’hui de faire la différence entre l’efficacité propre de l’acupuncture (des aiguilles sur les méridiens) et les effets contextuels ou placebo.
- Le Millepertuis a montré une efficacité à court terme supérieure au placebo en cas de dépression légère. Son usage est toutefois contre-indiqué en parallèle à une médication et à la pilule contraceptive.
Commentaire : c’est le résultat le plus significatif concernant les PNC mais le contexte est très précis : efficacité à court terme et en cas de symptômes dépressifs légers.
- L’huile essentielle de Lavande semble indiquée pour une meilleure gestion de l’anxiété et l’amélioration de la qualité du sommeil chez les femmes ménopausées. Son usage est contre indiqué en cas d’allergies, pour les femmes enceintes ainsi que les enfants de moins de 3 ans.
Commentaire : Les huiles essentielles sont présentées comme naturelles et valables pour tout le monde, ce qui n’est pas le cas. Il faut être attentif aux contre-indications mentionnées.
- La pratique de la méditation ou de la relaxation permet une meilleure gestion de la douleur (douleurs chroniques) ainsi qu’une meilleure gestion de l’anxiété (accouchement).
Commentaire : En général, c’est la Mindfulness qui est mise en avant pour la pratique de la méditation. Or il existe une controverse sur la qualité des études réalisées, avec des résultats somme toute peu convaincants. On peut imaginer que si la sophrologie caycédienne avait passé moins de temps à faire du marketing et plus à faire de la recherche, elle aurait pu donner des résultats similaires à la Mindfulness.
- Rapport coût-efficacité jugé favorable (Voir le Rapport du Conseil d’État au Grand-Conseil, État de Vaud)
Commentaire : C’est un des arguments qui a fait pencher la balance pour l’acceptation des thérapies complémentaires dans l’assurance de base en Suisse si elles sont pratiquées par un médecin : un coût faible pour une efficacité faible, c’est toujours bon à prendre.
Constat général : Les symptômes évalués dans la littérature scientifiques sont subjectifs : anxiété et douleurs. Aucune étude ne va évaluer la guérison d’une quelconque maladie par les PNC.
BÉNÉFICES ASSOCIÉS
- Être acteur de sa santé
On parle aussi d’Empowerment ou de salutogenèse. La consultation est orientée vers le mieux-être, la guérison au regard du médecin qui va se concentrer sur le diagnostic et le traitement de la maladie. Par l’écoute associée à ces approches, les patients peuvent parler de leur vécu : co-construction du sens. Toutefois, c’est aussi le travail du psychologue. J’y reviendrai en fin de capsule.
- Auto-soin
Possibilité de pratique à domicile avec le tai-chi, la méditation ou le yoga. Il n’est pas nécessaire d’effectuer ces approches sous supervision médicale. Quelques cours suffisent, ce qui renforce le patient d’être acteur de sa santé.
- Amélioration de la qualité de vie des patients
Il y a une vie en dehors de l’hôpital ! Les patients ont envie de pratiquer leur hobbies, passer du temps en famille, voir leurs collègues etc. En plus d’être patients et malades, ce sont des personnes avant tout. Les PNC permettent d’améliorer la satisfaction générale.
- Constitue une alternative aux traitements médicamenteux
«Alternative» peut être très mal interprété. Usage dans un contexte très spécifique. Par exemple, l’auriculothérapie, analysée par l’INSERM, donne la conclusion suivante : cette approche peut être pratiquée par du personnel paramédical, sans dangers et avec peu de formations / moyens, lors d’un trajet en ambulance pour la gestion de la douleur et de l’anxiété afin de diminuer le recours aux anxiolytiques.
CONCLUSION :
Les PNC s’inscrivent dans une démarche de “prendre soin” (care) du patient au regard de “soigner” (cure) la maladie. Il s’agit de distinguer ce qui est efficace au regard de ce qui fait du bien au patient, selon un entretien téléphonique que j’ai eu avec Stéphanie Träger, qui est à la tête d’un service d’oncologie proposant des soins de support.
Le schéma ci-dessus illustre la continuité une demande de temps pour soi, de bien-être, d’écoute, de relaxation, d’empathie fournie par les PNC et la nécessité d’une thérapie, domaine qui revient à la médecine.
Autres éléments en lien avec les professions de santé :
- Les PNC sont une porte d’entrée au soins
Une personne va plus facilement pousser la porte d’un thérapeute plutôt que d’un psychologue ou d’un médecin. C’est une bonne chose si les acteurs des PNC sont à même de déléguer auprès des professionnels compétents lorsque la situation l’exige et à compter qu’ils ont la formation adéquate pour déceler la nécessité de délégation.
- S’inscrit dans le Pluralisme thérapeutique
Le pluralisme thérapeutique existe déjà avec les soins infirmiers, les physiothérapeutes et kinésithérapeutes, les logopédistes, les ergothérapeutes, les psychologues etc. Qu’on le veuille ou non, il faut faire avec les PNC qui sont aussi des acteurs dans la prise en charge des patients, par exemple pour du soutien émotionnel.
L’attrait pour ces approches provient aussi de la déception relevée par les patients par rapport au suivi psychologique : du conformisme des psychologues qui ont tendance à se cacher derrière leurs grilles d’évaluation et leur protocoles, ce que j’appelle la psychologie fonctionnelle, on se tourne vers des thérapeutes parfois un peu trop perchés avec le risque d’avoir une prise en charge inadéquate.
Un exemple un peu extrême pour illustrer le pluralisme thérapeutique :
Julie Beischel a montré dans une étude de 2015 avec 83 participants le bénéfices associé au recours à des médiums lors de situations de deuil. Les résultats montrent que le processus de deuil est plus rapide dans le cas d’une consultation auprès d’un médium que dans le cas de suivi psychologique classique. En revanche, le degré de souffrance initial est moindre lors de la consultation chez un médium que chez un professionnel classique.
Le recours aux médiums peuvent être vécues comme expérience exceptionnelles : Sensation de télépathie, de contact avec un défunt. Or, les patients sont très réticents à parler de ce type d’expérience auprès de leur référent thérapeutique, de peur d’avoir un aller simple vers l’hôpital psychiatrique. De plus, les professionnels de santé ne sont pas sensibilisés à accueillir ce type d’expérience.
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RÉFÉRENCES
Qaseem, A., Wilt, T.J., McLean, R.M., Forciea, M. (2017) Noninvasive treatments for acute, subacute, and chronic low back pain : a clinical practice guideline from the American College of Physicians. Ann Intern Med. 2017;166(7):514-530.
Descriptif
Recommandations de l’American College of Physicians des traitements non-invasifs pouvant être utilisés en cas de douleurs dorsales chroniques. Son mentionnées le tai chi, le yoga mais également l’acupuncture et la pratique de la méditation. Toutefois, les preuves sont de faibles qualité.
Cramer et al. (2017) Yoga for improving health-related quality of life, mental health and cancer-related symptoms in women diagnosed with breast cancer. Cochrane Database of Systematic Review, Issue 1. CD010802.
Descriptif
Revue systématique des études évaluant l’efficacité de la pratique du yoga sur la qualité de vie des femmes souffrant du cancer du sein. Toutefois, les résultats indiquent que les preuves sont de qualité modérées.
Lee, A., Chan, S.K.C., Fan, LTY. (2015) Stimulation of the wrist acupuncture point PC6 for preventing postoperative nausea and vomiting. Cochrane Database of Systematic Reviews, Issue 11. CD003281.
Descriptif
Revue systématique des études évaluant l’efficacité du point d’acupuncture PC6 pour diminuer les nausées et vomissements post-opératoires. Toutefois, les résultats indiquent que les preuves sont de qualité modérées.
Linde et al. (2016) Acupuncture for the prevention of episodic migraine. Cochrane Database of Systematic Reviews Issue 6. Art. No.: CD001218.
Descriptif
Revue systématique des études évaluent l’efficacité de l’acupuncture en prévention des migraines. Les résultats globaux indiquent des preuves de qualité modérées. Certains des auteurs de l’étude ayant une pratique d’acupuncture recommandent tout de même cette option en alternative aux médications usuelles.
Goyal, M., Singh, S., Sibinga, E.M., et al. (2014) Meditation programs for psychological stress and well-being: a systematic review and meta-analysis. JAMA Intern Med;174(3):357-368.
Descriptif
Revue systématique montrant que la Mindfulness n’a que des effets modérés sur la dépression, l’anxiété et la gestion de la douleur. La limitation des recherches résident dans la méthodologie.
Marc, I., Toureche, N., Ernst, E., Hodnett, ED., Blanchet, C., Dodin, S., Njoya, MM. (2011) Mind‐body interventions during pregnancy for preventing or treating women’s anxiety. Cochrane Database of Systematic Reviews, Issue 7. CD007559.
Descriptif
Revue systématique des approches psycho-corporelles (training autogène, biofeedback, hypnothérapie, imagerie, méditation, prière, auto-suggestion, tai-chi et yoga) en prévention de l’anxiété durant la grossesse. La diversité des études et des méthodologies utilisées ne permettent pas de donner des résultats clairs. Toutefois, elles semblent efficaces pour mieux gérer l’anxiété dans le cadre de la grossesse.
Qin X.N., Nandini V., Collin Y.X.H. (2017) Clinical use of Hypericum perforatum (St John’s wort) in depression: A meta-analysis. Journal of Affective Disorders, Volume 210:211-221.
Descriptif
Méta-analyse (analyse de toutes les études sur le sujet pour en dégager un effet global) des effets du Millepertuis comparés à la prise d’antidépresseurs de type sérotoninergiques (SSRI) en cas de symptômes dépressifs. Probablement le résultat le plus solide de la littérature scientifique. A noter le contexte bien précis de l’usage du Millepertuis : efficace à court terme et en cas de symptômes dépressifs légers. Enfin, son usage est contre indiqué en parallèle à la pilule contraceptive.
Yap, W.S., Dolzhenko, A.V., Jalal, Z. et al. (2019) Efficacy and safety of lavender essential oil (Silexan) capsules among patients suffering from anxiety disorders: A network meta-analysis. Sci Rep 9, 18042.
Descriptif
Méta-analyse (analyse de toutes les études sur le sujet pour en dégager un effet global) des effets de l’huile essentielle de Lavande (Silexan) sur les patients souffrant d’anxiété. Cinq études pour un total de 524 participants montrent une diminution significative de l’anxiété avec l’usage de Silexan 160mg au regard d’un dosage moindre (80mg), du recours à la paroxetine 20mg ou du placebo. De faibles effets indésirables tels que troubles gastro-intestinaux, nausées, diarrhées ont toutefois été observés. A noter le faible nombre d’études prises en compte et la nécessité de poursuivre les recherches dans ce sens afin d’affiner les résultats.
Gürler M, Kızılırmak A & Baser M. (2020) The Effect of Aromatherapy on Sleep and Quality of Life in Menopausal Women with Sleeping Problems: A Non-Randomized, Placebo-Controlled Trial. Complement Med Res. Jun 9:1-10.
Descriptif
Petite étude effectuée sur 57 femmes visant à évaluer les effets de l’aromathérapie (Huile essentielle de Lavande en inhalation) sur la qualité du sommeil et la qualité de vie. Bien que les résultats sont significatifs, il s’agit d’une étude sans double aveugle et sans randomisation (les groupes n’ont pas été constitués au hasard et ceux-ci savaient s’ils administraient l’huile essentielle ou un placebo) donc les résultats méritent d’être confirmés par d’autres études avant d’en tirer des conclusions claires.
Rapport du Conseil d’État au Grand-Conseil sur le postulat Christa Calpini et consorts pour un centre de médecines complémentaires en phase avec les besoins des patients du CHUV, N°366, Canton de Vaud, Avril 2017.
Descriptif
Pour la création d’un centre de médecine intégrative et complémentaire (le futur CEMIC) au sein du CHUV. Différents chiffres intéressants sont cités : près de 50% des suisses ont eu recours aux PNC par exemple. ⅓ en oncologie. 63% des professionnels de santé rapportent ne pas avoir assez de connaissances sur les PNC. Enfin, concernant le Tai-Chi : “un effet coût-efficacité favorable : Par exemple le tai-chi réduit les risques de chute chez les patients avec maladie de Parkinson, de manière coût-efficace. C’est un des argument qui a probablement fait pencher la balance pour l’acceptation des médecines complémentaires dans l’assurance de base en Suisse.
Suissa, V. (2017) Évaluation de l’impact des Médecines Complémentaires et Alternatives (MCA) chez les patients atteints de cancer. Thèse en vue de l’obtention du Doctorat de Psychologie Clinique, Université Paris VIII Saint-Denis.
Descriptif
Thèse sur le recours aux PNC en oncologie mettant en évidence la déception des patients ayant eu recours aux suivis de psychologues. Cette déception peut expliquer le recours aux PNC : P. 354 : « L’analyse du discours des utilisateurs de MCA (Médecine Complémentaire et Alternative) nous indique que l’accompagnement psychologique est perçu comme insuffisant en institution médicale, mais également qu’il souffre d’une représentation sensiblement négative chez ces patients » par exemple : « J’avais vu à l’hôpital deux fois la psychologue, mais pareil, elles sont complètement débordées, elle a essayé de se montrer le plus à l’écoute possible, mais bon on voyait qu’on en rajoutait ».
Rodondi, P.-Y. et al. Médecines complémentaires et lombalgies : que dit la littérature scientifique ? Revue Médicale Suisse 2017 ; 13 : 1300-3
Descriptif
Revue de littérature sur les PNC en cas de lombalgie. L’auteur met en évidence la pratique en auto-soin possible avec les approches telles que l’auto-hypnose, la méditation, le tai chi ou le yoga.
INSERM
Évaluation de l’efficacité de la pratique de l’auriculothérapie, 25.07.2013
Descriptif
Rapport de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) visant à évaluer l’efficacité de l’auriculothérapie. Les auteurs mentionnent l’exemple de l’usage de l’auriculothérapie comme alternative aux traitements médicaux : afin de diminuer le niveau d’anxiété de patients âgés lors d’un trajet en ambulance pour une future intervention.
Beischel, J.; Moscher, C. & Boccuzzi, M. The Possible effects on Bereavement of assisted after-death communiation during readings with psychic mediums : A continuing Bonds perspective. Omega (Westport). 2014-2015;70(2):169-94.
Descriptif
Petite étude sur le recours aux médiums en cas de deuil. Les résultats montrent que les consultations auprès de médiums peuvent soulager plus rapidement la douleur due au deuil au regard de mois, voire d’années de consultations thérapeutique classiques telles que la psychothérapie.